Origine et histoire de la Chapelle des Pénitents Noirs
La chapelle des Pénitents Noirs de la Miséricorde se situe à Avignon, dans la rue de la Banasterie. Elle a accueilli l’une des confréries les plus importantes de la cité papale. À Avignon se succédèrent plusieurs confréries de pénitents : les « Pénitents gris » furent les premiers, puis apparurent les « Pénitents noirs » fondés en 1488 par des Florentins, suivis des « Pénitents Blancs » en 1527, des « Pénitents bleus » en 1557 et, à la fin du XVIe siècle, des « Pénitents noirs de la Miséricorde ». Le mouvement se poursuivit ensuite avec les « Pénitents violets » en 1622 et les « Pénitents rouges » en 1700 ; la Révolution mit fin à cet essor et, aujourd’hui, seuls subsistent à Avignon les Pénitents gris et les Pénitents noirs.
La confrérie des Pénitents noirs de la Miséricorde fut fondée en 1586 par Pompée Catilina, militaire envoyé par Rome pour diriger les troupes pontificales à Avignon. Il réunit des ressortissants italiens afin de secourir les prisonniers et assister les condamnés ; la confrérie s’établit d’abord dans la chapelle de l’Hôpital Notre-Dame de Fenouillet, près de la Porte Aurose. Le premier recteur mourut en 1615 et fut inhumé dans la collégiale Saint-Agricol ; son tombeau est l’œuvre du sculpteur florentin Simone Bartolacci. La confrérie cessa ses activités en 1948, puis renaquit en 1983.
Sur le plan cérémoniel, la confrérie détenait des privilèges pontificaux : Clément VIII lui accorda le 8 septembre 1596 le droit d’obtenir la libération d’un condamné à mort le jour de la fête de la Décollation de saint Jean‑Baptiste, et Paul V lui permit, le 18 octobre 1617, de solliciter la grâce d’un condamné quel que fût le jour de l’année. Après l’accord du vice‑légat, le condamné était conduit menotté d’une chaîne d’argent par le recteur jusqu’à la chapelle, revêtu d’une robe rouge et coiffé d’une guirlande d’olivier, puis promené dans les rues précédé de suisses et d’une fanfare, tandis que la foule et les choristes entonnaient Te Deum et Benedictus. Le cardinal de Richelieu prit part à cette cérémonie lors de son exil à Avignon en 1618‑1619.
La confrérie acquit la propriété de la chapelle Notre‑Dame de Fenouillet en 1591 ; elle y fit ajouter une sacristie en 1620 et une antichapelle en 1631. De nombreux travaux décoratifs eurent lieu tout au long du XVIIe siècle, avec l’installation de riches boiseries encadrant des toiles de grands peintres avignonnais. Dans les années 1720, la confrérie obtint la gestion d’un hospice voisin pour aliénés et le recteur Manne lança de nouveaux embellissements, confiant la reconstruction de la façade à Thomas Lainée ; après la mort de Lainée en janvier 1739, Jean‑Baptiste Franque poursuivit le chantier et exécuta le projet de son prédécesseur. La chapelle a été classée monument historique en 1906.
La façade se distingue par une grande gloire en ronde‑bosse sculptée par Pierre Bondon, centrée sur une nuée d’anges portant la tête de saint Jean‑Baptiste sur un plat, rappelant le vocable de la Décollation de saint Jean‑Baptiste. À l’intérieur, les superbes boiseries encadrent des toiles de qualité, même si de nombreuses œuvres ont été dispersées pendant la Révolution et remplacées par des tableaux sans lien avec les sujets d’origine. Les grandes toiles de la nef formaient autrefois un ensemble cohérent, alternant scènes de la Passion et épisodes de la vie de saint Jean‑Baptiste ; parmi les œuvres conservées ou signalées figurent le retable du chœur par Domenico Borboni et Michel Péru encadrant un Christ mourant de Nicolas Mignard, des grands tableaux de Reynaud Levieux, Pierre Parrocel, Pierre II Mignard, Joseph François Parrocel, Pierre Courtois et Delettre, ainsi que le plafond peint L’Apothéose de saint Jean‑Baptiste par Pierre Courtois (1739), aujourd’hui sévèrement restauré. Les petits tableaux circulaires d’origine ont en grande partie disparu et ont été remplacés notamment par des peintures du XIXe siècle de Pierre Raspay.
En 1983, la chapelle fut confiée à l’association Saint‑Jean‑Baptiste, dont les offices étaient célébrés par le chanoine René Devaux ; par la suite, les prêtres du prieuré de Saint‑Ferréol (Marseille), de la Fraternité Saint‑Pie‑X, assurent la célébration de la messe.